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Une indemnité d’éviction subordonnée à une prise en compte de la valeur du droit

Une indemnité d’éviction subordonnée à une prise en compte de la valeur du droit au bail

Cass com, 13 oct 2021, n°20-19.340

Dans le cadre d’un bail commercial, le locataire a un droit au renouvellement de son bail. C’est ce que prévoient les dispositions des articles L145-1 et suivants du Code de commerce. Toutefois, dans une optique de protection du statut du locataire-commerçant, le législateur a édicté en 1926 des mesures de préservation : le bailleur peut refuser le renouvellement à la seule condition de payer une indemnité d’éviction. Ainsi, la question de savoir comment évaluer et déterminer l’indemnité d’éviction vient à se poser. Qu’en est-t-il ?  `

C’est par un arrêt publié du 13 octobre 2021 que la Cour de cassation apporte la solution : l’indemnité d’éviction doit être fixée en tenant compte de la valeur du droit au bail des locaux dont le locataire est évincé, lequel est un élément du fonds de commerce. 

Les faits sont les suivants : dans un centre commercial, une société propriétaire de locaux commerciaux a donné à bail un local à une autre, puis par la suite lui a délivré un congé avec refus de renouvellement et offre de paiement d’une indemnité d’éviction. La société locataire qui s’était réinstallée dans d’autres locaux commerciaux assigna la société bailleresse en fixation de l’indemnité d’éviction.

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 27 mai 2020, énonce que la valeur du droit au bail est nulle et limite l’indemnité d’éviction aux seules indemnités accessoires. Elle juge à ce titre que : 

Dans l’hypothèse où le preneur s’est effectivement réinstallé dans un nouveau local équivalent avant la fixation de l’indemnité, le coût locatif de ce local doit être pris en compte.

Il n’y avait pas de différentiel de loyer positif puisque le loyer des locaux de transfert était inférieur au loyer des locaux dont avait été évincée la société locataire. Par ailleurs, le nouveau bail n’avait pas été conclu dans des conditions désavantageuses pour ladite société qui pouvait y exercer la même activité dans des locaux de superficie équivalente moyennant un loyer moins élevé et sans avoir eu à régler de droit d’entrée.

La Cour de cassation opère une cassation partielle au visa de l’article L145-14 du Code de commerce en relevant que l’indemnité d’éviction doit être égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement. Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce. Elle retient alors que la Cour d’appel aurait dû tenir compte de la valeur du droit au bail portant sur le local dont le preneur a été évincé. 

Quels sont les intérêts d’une telle décision ? 

La valeur du droit au bail repose sur la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve d’un préjudice moindre. L’arrêt rapporté permet de rappeler les éléments à prendre en compte pour fixer le montant de l’indemnité d’éviction notamment en cas de transfert de l’activité du locataire.