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Licenciement économique et doublement de l'indemnité légale

Ce sont les dispositions légales ou conventionnelles en vigueur à la date de la notification du licenciement, et non celles qui pourraient intervenir en cours de préavis, qui déterminent les droits du salarié.


En l’espèce, une salariée est licenciée pour motif économique par lettre du 2 mai 2002. Elle saisit le conseil des prud’hommes pour obtenir un complément d’indemnité de licenciement, déterminé en fonction des dispositions du décret du 3 mai 2002, entré en vigueur le 7 mai suivant.


Remarque : pour mémoire, ce décret d’application de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a doublé l’indemnité légale de licenciement pour motif économique. Cette indemnité est désormais égale, pour les salariés ayant une ancienneté comprise entre 2 et 10 ans, à deux-dixièmes de mois de salaire par année d’ancienneté (contre un dixième de mois auparavant). Ainsi la salariée tentait-elle en l’espèce d’obtenir le doublement de son indemnité de licenciement.


Les juges du fond ont fait droit à sa demande, considérant que, si le droit à l’indemnité de licenciement naît à la date d’effet du licenciement, son montant se calcule à la fin du préavis. Ils ont été censurés par la chambre sociale de la Cour de cassation.


Cette dernière a jugé, conformément à sa jurisprudence, que le droit à l’indemnité de licenciement naît à la date où le licenciement est notifié et que ce sont les dispositions légales ou conventionnelles en vigueur à cette date qui déterminent les droits du salarié. Dès lors, sauf clause expresse contraire, des dispositions légales ou conventionnelles intervenues au cours de la période de préavis ne peuvent diminuer ou augmenter la quotité de ces droits. En conséquence, le doublement de l’indemnité de licenciement prévu par le décret du 3 mai 2002 n’était pas applicable au licenciement notifié le 2 mai 2002.


Remarque : conformément à ce que soutenaient les juges du fond, il est de jurisprudence constante que, pour le calcul du montant de l’indemnité, les droits de l’intéressé s’apprécient à la date d’expiration normale du délai-congé, qu’il soit ou non exécuté. Mais il ne faut pas tout mélanger. Si l’ancienneté minimale de 2 ans est acquise au jour de la notification du licenciement, il convient alors de calculer le montant de l’indemnité de licenciement en prenant en compte, dans l’ancienneté du salarié, la période de préavis, que celui-ci soit ou non effectué. Cela ne signifie pas pour autant, contrairement à ce que soutenait la cour d’appel, que doivent être appliqués, pour ce calcul, les nouveaux taux légaux entrés en vigueur entre la notification du licenciement et la fin de la période de préavis.


Rappelons par ailleurs qu’opérant un revirement de jurisprudence, la Cour de cassation a récemment jugé que la rupture du contrat de travail se situe à la date où l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin, c’est-à-dire au jour de l’envoi de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception notifiant la rupture, et non à celui auquel le salarié en a été informé (Cass. soc., 11 mai 2005, n° 03-40.651, Magnier et a. c/ Sté P & O Stena Line Limited : Bull. civ. V, n° 159). Ainsi, le droit à l’indemnité de licenciement (ouvert aux salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur) devra désormais être apprécié à la date d’envoi de la lettre recommandée notifiant le licenciement, et non plus à la date de présentation de cette lettre au salarié.

Cass. soc., 11 janv. 2006, n° 03-44.461, AGS et a. c/ Leclercq et a.
Rédaction : Dictionnaire Permanent Social